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Homélie du Jeudi Saint

Publié le 22 avril 2024

Aujourd’hui nous sommes le Jeudi 28 MARS 2024, jeudi saint, la liturgie nous invite à méditer sur les textes suivants :

  • Lecture du livre de l’Exode (12, 1-8.11-14)
  • Psaume 115, avec comme refrain : « La coupe de bénédiction est communion au sang du Christ »
  • Lecture de la première lettre de saint Paul apôtre aux Corinthiens (11,23-26)
  • Évangile de saint Jean (13, 1-15)

Peuple de Dieu ! Chers Frères et Sœurs dans le Seigneur, la célébration de ce jeudi saint ouvre officiellement le Triduum Pascal dans le contexte d’un repas, lieu de communion, d’intimité et de fraternité. C’est au cours de ce repas que Jésus, à travers certains gestes transmet ce que nous célébrons aujourd’hui, l’Eucharistie. C’est à table qu’il prend du pain, le consacre, et le donne à ses disciples, il prend le vin, le consacre, prie, le donne à ses disciples. A chaque fois il dit : « Faites cela en mémoire de moi ». Ce pain préfigure ce que sera son corps livré. Ce vin préfigure ce que sera son sang versé, donné totalement, intégralement, pour le salut du monde. Jésus veut vivre comme un avant-goût du vendredi saint avec ses disciples, il se sert donc de ces images. Le pain et le vin sont le fruit du travail de l‘homme, le fruit de nos labeurs. C’est pour cela qu’il y a une corrélation étanche, étroite, entre la quête et l’offertoire à la messe. A la quête on recueille le fruit du travail des uns et des autres et à l’offertoire, le prêtre le présente, avec le pain et le vin au Seigneur.  Il dit de faire cela en mémoire de lui, afin que ce soit un mémorial qui est vivant de génération en génération et non seulement un souvenir. 


Nous avons lu : « …chaque fois que vous mangerez ce pain et que vous boirez à cette coupe, vous proclamez la mort du Seigneur, jusqu’à ce qu’il vienne ». Donc, les effets de ‘Eucharistie ne sont pas des effets de l’ordre du souvenir, comme lorsqu’on célèbre un anniversaire. Les effets de l’Eucharistie sont des effets vivants : « Vous ferez cela en mémoire de moi, vous vous rappellerez, jusqu’à ce que je vienne, qu’il s’agit de Jésus présent, vivant, et agissant ».

Donc, à travers cette fête, en choisissant ce pain et ce vin qui deviendront son corps et son sang, Jésus fait sentir un avant-goût du vendredi saint à ses disciples et nous donne, par ce fait, un moyen de pérenniser sa présence parmi nous toutes les fois que nous célébrerons l’Eucharistie ou la messe qui est la source et le reflet de notre foi. La grâce particulière de nous unir à Jésus qui se donne à nous à travers ce pain et ce vin, qui deviendront son corps et son sang. Et il institue donc le sacerdoce pour des personnes choisies parmi vous et qui agiront en lieu et place de Jésus et chaque fois, ils le feront au nom de Jésus : « in persona Christi ». Ce Jésus qui se donne à nous en communion, nous faisons corps avec lui à travers la messe au cours de laquelle nous nous unissons à lui et à nos frères, double mouvement, double grâce.

Juste après ce premier signe, Jésus en donne un autre celui du lavement des pieds. « Il se lève de table, dépose son vêtement….. », il quitte la table . Je vais spécialement m’appesantir sur quelque chose : On dit qu’il commence par déposer son vêtement. C’est important de le savoir, il porte un habit approprié à ce qu’il va faire, il porte en somme « le vêtement de service ». Le vêtement, dans la bible, est la personnalité profonde de chacun. Car il n’y a pas de différence entre Jésus et son vêtement. Déposer sa dignité, déposer sa puissance, Déposer son vêtement pour quoi faire ? Un travail qui est dévolu aux esclaves : Laver les pieds du Maitre. Déposer son vêtement avant de revêtir son habit de service. On ne peut pas servir si on ne passe pas par ce préalable.

En pensant à ce dépôt du vêtement, je pense au texte de St-Paul aux Philippiens, 2,1-7 : « Jésus ayant la condition de Dieu, ne retint pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu. Mais il s’est anéanti, prenant la condition de serviteur, devenant semblable aux hommes. Reconnu homme à son aspect, il s’est abaissé, devenant obéissant jusqu’à la mort, et la mort de la croix. ». Le premier lieu où Jésus avait déposé son vêtement est celui de l’Incarnation. Il n’a pas retenu le rang qui l’égalait à Dieu pour se faire homme. Le deuxième lieu et le grand lieu, le plus sublime est sur la croix, où il accepte de mourir comme un vulgaire bandit. Nous ne pouvons pas servir sans renoncer à nos dignités. J’aime bien cette expression française qui marque la distance et le respect: « En vos rangs, grades et qualités ». Quand on a dit ça, on ne se mélange pas. Seul le service peut contredire cette expression française. Car justement, dans l’église il n’y en a pas. Jésus qui était le Fils de Dieu a accepté de s’humilier, de s’abaisser en lavant les pieds de ses disciples il devient serviteur. En grec il y a deux mots pour serviteur : serviteur dans le sens de ministre : diakonos qui a donné le mot diaconie et comme doulos, c’est-à-dire esclave. Pour se mettre au service, pour se mettre au diapason des hommes, il faut perdre quelque chose, on doit perdre un peu de sa dignité et Dieu a accepté de perdre un peu de sa dignité le jour de, son incarnation en Jésus Christ et le jour de sa mort sur la croix. Seul le service peut enlever cette expression :  « En vos rangs, grades et qualités ». 

Par le baptême nous nous sommes unis à Jésus qui nous a donné un nouveau rang, nous sommes égaux dans le cœur de Dieu, nous sommes égaux entre nous et vous connaissez cette belle phrase de Saint-Augustin, Evêque, qui disait à ses paroissiens : « Pour vous, je suis Evêque, avec vous, par le baptême, nous sommes chrétiens ». En église, le rang est celui qui est donné par le baptême, c’est le rang de l’égalité. Le grade est la dignité d’être enfant de Dieu que nous recevons par le baptême, c’est la seule dignité, la seule richesse qui nous rend configurés à Dieu. Malgré toutes les qualités, les missions qui nous sont données par Dieu, la seule qualité qui puisse dépasser toutes les qualités est l’amour, l’abaissement et l’humilité. C’est ce que Jésus dépose : toute sa dignité, toute sa seigneurie, pour faire ce qui est dévolu à un esclave, pour servir dans le sens de service diakonos, serviteur ordinaire, que dans le sens de doulos , c »’est-à-dire esclaves. Un esclave perd un peu de lui-même devant son maître, C’est cela que Jésus veut nous montrer lorsqu’il fait ce geste et donne un exemple.

Aujourd’hui le Seigneur nous appelle tous à être à sa suite. Nous devons abandonner le vêtement de l’orgueil, de la suffisance, de la volonté de puissance, du savoir, de l’avoir et du pouvoir, toutes ces gangrènes qui sont en train de ruiner la vie de notre Eglise.

Dieu seul sait combien nos vêtements sont lourds aujourd’hui, combien ils sont spacieux et difficiles à enlever, pour se mettre au diapason des autres, à leur niveau, au service.

Seul le service peut bannir la distance, le protocole, la séparation, 

Seul le service nous invite à l’humilité et à l’ abaissement, alors nous serons serviteurs, mais nous serons surtout doulos, esclaves.

DIEU N’ABANDONNE PAS SON PEUPLE

Amen

Votre Frère, 

Abbé Chris Brunel GOMA

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